La géopolitique et la macroéconomie, nouveaux outils du dirigeants
Giuliano da Empoli au MEDEF : comme il l’a souligné, c’est une première. Qu’un écrivain et conseiller politique fasse salle comble devant des chefs d’entreprise, c’est inédit. La géopolitique internationale s’impose plus que jamais comme un sujet d’intérêt majeur pour les dirigeants.
“Power without a nation’s confidence is nothing.”
Catherine II dit Catherine La Grande (1729-1796)
La géopolitique et la macroéconomie font désormais pleinement partie des compétences stratégiques attendues des dirigeants.
Pendant longtemps, la géopolitique était un bruit de fond. Un facteur périphérique que l’on surveillait de loin, sans l’intégrer véritablement dans les décisions du quotidien. Les affaires se faisaient à l’abri du politique, dans un monde globalisé où l’on croyait à la libre circulation des biens, des capitaux, des idées — et parfois des illusions.
Ce monde n’existe plus.
Depuis quelques années - et de manière brutale depuis la pandémie, la guerre en Ukraine, puis l’élection de Donald Trump, la géopolitique s’est imposée comme une variable structurante du monde des affaires. Plus personne n’est à l’abri des chocs systémiques.
La probabilité d’évènements peu fréquents a considérablement augmenté et doit être prise en compte comme nous l’avait dit Nassim Nicolas Taleb depuis de nombreuses années.
C’est pourquoi, aujourd’hui, on parle davantage de robustesse des chaînes logistiques que de leur d’optimisation.
Le retour de la guerre sur le sol européen, la montée des tensions sino-américaines, la fragmentation des chaînes de valeur, la compétition pour les ressources critiques, la régionalisation des échanges, les sanctions économiques, les nationalismes technologiques, les tensions autour de l’énergie, les enjeux de cybersécurité… Tous ces éléments dessinent une nouvelle géographie du risque, mais aussi une nouvelle cartographie des opportunités.
Il ne s’agit plus simplement de « faire du business » à l’étranger, mais de comprendre dans quel monde nous faisons du business. Un monde ni stable, ni homogène, ni neutre, où un petit pays comme l’Ukraine peut détruire plusieurs milliards de dollars d’aviation avec quelques drones et un génie de l’organisation.
L’entreprise comme acteur géopolitique malgré elle
Même les entreprises qui se pensent apolitiques ou purement locales sont rattrapées par ces dynamiques. Produire, vendre, recruter, innover, communiquer : chacune de ces actions est désormais exposée à des enjeux de souveraineté, de régulation, d’identité ou de normes culturelles.
Et ce n’est pas tout : dans un monde où les États attendent des entreprises qu’elles soient « alignées » avec les intérêts nationaux, où les consommateurs attendent des engagements éthiques, et où les actionnaires scrutent les risques ESG, le dirigeant devient, qu’il le veuille ou non, un stratège politique. On le voit avec le succès du soft power Chinois de ces dernières années, ou l’impact de la relation entre Trump et Musk sur le cours de bourse de Tesla.
Le dirigeant stratège doit intégrer une grille de lecture géopolitique
Ce nouveau contexte appelle une posture renouvelée du leadership. Le dirigeant qui développe une grille de lecture géopolitique devient capable de :
Décoder les rapports de force invisibles derrière ses partenariats.
Identifier les zones d’instabilité avant qu’elles ne deviennent des crises.
Anticiper les régulations, les sanctions, les fermetures de marché.
Cette vision élargie permet de gagner en antifragilité et en agilité. Il ne s’agit pas pour le dirigeant de devenir géopolitologue, mais de se doter d’une conscience du monde, d’un regard stratégique élargi, nourri, informé.
Cela suppose de faire certains paris, d'être vigilant sur ses implantations géographiques de production vs chiffre d’affaire, bref d’introduire de nouveaux critères dans ses choix stratégiques.
De même on voit bien que Poutine à compris l’importance stratégique d’allier macroéconomie et pouvoir, ce qui lui a permis de tenir économiquement beaucoup mieux que ce que certains prédisaient. A l'inverse, en France, Emmanuel Macron a longtemps sous-estimé cette dimension macroéconomique dans sa politique, en la considérant comme un sujet technique réservé aux spécialistes - Bercy.
Élargir le champ de la stratégie
La géopolitique ne relève plus du luxe intellectuel. Elle est devenue une compétence stratégique du XXIe siècle, au même titre que la macroéconomie, la transformation numérique ou l”intégration de l’IA dans l’organisation. Il ne s’agit pas pour le dirigeant de devenir géopolitologue, mais de se doter d’une conscience du monde, d’un regard stratégique élargi, nourri, informé.
L’entreprise est un acteur du monde. Le dirigeant, son interprète. Il doit apprendre à lire entre les lignes des cartes, à écouter les signaux faibles (early signals en anglais) , à comprendre le jeu des puissances et les aspirations des peuples. Lisez les 3 livres passionnants de Giuliano da Empoli pour que vos décisions intègrent ces incertitudes et garder le cap dans cet environnement aussi incertain que globalisé.
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